Résidence de Joséphine Herbelin pour le festival Maintenant 2015

Publié le 10 septembre 2015 /

Barnabé, petit être dans un grand monde.

À l’approche du festival Maintenant, qui se déroulera du 13 au 18 octobre 2015 à Rennes, une jeune artiste vient tester son projet de performance qui sera présenté les 15 et 16 octobre au Grand Cordel Mjc et les 17 et 18 octobre au Cadran (Maison de Quartier de Beauregard), auprès d’un jeune public de 5 à 10 ans. Son nom est Joséphine Herbelin. Elle conte des histoires.

Cest au Grand Cordel Mjc que Joséphine nous présente son projet. Sur des décors au style graphique inspiré de la nouvelle vague des dessins animés américains, elle nous conte l’histoire de Barnabé, un être vivant peu loquace qui tente de fuir son animal de compagnie devenu fou. Sissi, son paresseux de compagnie se trouve très énervé lorsque Barnabé lui apprend que son paquet de céréales préférées est fini… Tout le monde peut aisément comprendre la rage qu’éprouve ce malheureux animal lorsque son petit déjeuner est annulé.

Barnabé © Joséphine Herbelin

Barnabé qui ne montre que peu d’émotions -il est voulu ainsi par l’artiste- devra donc traverser les différents niveaux et son lot de rencontres improbables que lui invente le public à chaque étape de son voyage pour atteindre la Lune et être enfin sauf. C’est une performance interactive qui est proposée ici. Le public y joue un rôle important. Barnabé et Sissi se ressemblent par leur étrangeté et leur passivité apparente. C’était un choix de l’artiste que de prendre un animal qui soit tout aussi étrange que Barnabé, ce petit « poisson rouge » qui marche sur la terre ferme. Sissi ressemble quelque peu aux ombres que l’on peut parfois voir dans les films de Hayao Miyazaki comme cette ombre très gourmande dans « Le voyage de Chihiro ».

Pour reprendre le déroulement de l’histoire, Barnabé sort de sa maison apeuré et se retrouve devant son premier défi qu’il doit franchir pour atteindre les montagnes, se rapprochant ainsi petit à petit de sa Lune. Des montagnes il s’envolera ensuite vers les nuages pour continuer son périple dans un décor composé d’étoiles, de planètes ou de comètes symbolisant l’espace. C’est uniquement après cette étape qu’il arrivera sur la Lune.

À chaque étape du voyage, Joséphine va questionner l’auditoire afin de savoir ce qu’il veut faire subir à Barnabé. C’est à ce moment que le public comprend quel pouvoir il possède sur ce petit personnage et sur l’histoire plus généralement. Il va sans dire que gérer toutes ces idées qui vont et viennent n’est pas la chose la plus aisée pour Joséphine. Elle doit en effet faire face à de multiples propositions, combler les attentes des uns, refréner les envies folles des autres. Ce petit jeu de décision entre le public et Joséphine nous offre parfois des moments assez comiques.

Résidence de Joséphine Herbelin au Grand Cordel Mjc © Gwendal Le Flem

C’est en peignant directement sur les décors que l’artiste crée les désirs de son public. Ses dessins adoptent toujours un style épuré, simplifié, cartoon. Ils sont beaux, faciles à comprendre, souvent drôles. Que choisir entre un vaisseau spatial et un poisson volant ? Les uns se battent pour le poisson, les autres pour le lit… Joséphine décide qu’il s’agira d’un poisson dans un lit… Barnabé rencontre un crocodile sur le pas de sa porte… Il fuit, revient dans sa maison… Joséphine annonce le « Game Over ». Tout est à recommencer.

Résidence de Joséphine Herbelin © Gwendal Le Flem    

C’est ainsi qu’elle gère la durée de l’histoire et surtout son intrigue pour donner encore plus d’intérêt à l’objectif, et forcer le public à imaginer des défis que Barnabé pourrait surpasser. S’il rencontre un loup, il s’envole vers les montagnes. Il a cette capacité à décider de ne plus avoir peur à un moment insoupçonnable. C’est Barnabé, et c’est surtout Joséphine. 

L’histoire contée peut faire penser à ce fameux « Livre dont vous êtes le héros » même si l’on ne choisit pas vraiment quel chemin prend le héros. La dimension du choix ici est toute autre. Le public est amené à créer une partie du monde. C’est la différence entre ce genre de performance et un livre ou un jeu vidéo. Ils sont soit codés, soit écrits et les choix sont donc prédéfinis. On peut dire que Joséphine nous immerge vraiment dans un monde ouvert avec sa petite « patte » artistique qui fait son effet. C’est donc un spectacle original à conseiller à tous, il n’est pas destiné qu’aux plus jeunes. Si l’imagination ne devrait pas faire défaut, il faut aussi savoir qu’il existe une version plus adulte du spectacle. Celle-ci, reste encore à découvrir.


Joséphine Herbelin © Gwendal Le Flem

Techniquement, Joséphine travaille seule sur ce projet. Elle a créé les dessins qui servent de décors, la musique et les animations de Barnabé. Pour donner vie à son personnage, elle utilise le logiciel Resulum Arena. C’est ainsi que l’on créa la vie… Musicalement, elle s’inspire beaucoup du jeu vidéo, notamment « old school », du 8-BIT. Ce sont des musiques comme celles d’«Animal Crossing » qu’elle cite comme ses références. La tendance est à la nostalgie comme bon nombre de jeux vidéos qui reprennent aujourd’hui les codes des jeux d’antan. C’est une mode, elle la suit, elle en a conscience, et c’est diablement efficace.

Joséphine entame sa troisième année d’études à Paris où elle est inscrite en DMA (Diplôme des Métiers d’Art) Illustration à l’école Estienne. C’est durant ses études qu’elle a créé l’histoire de Barnabé. Elle a été sélectionnée lors de l’appel à projets « Arts & Technologies » lancé par Electroni[k] pour l’accompagnement à la création d’une performance pour le festival Maintenant 2015.

   Joséphine Herbelin en résidence au Grand Cordel Mjc © Gwendal Le Flem   

 Photos prises par Gwendal LeFlem

Article rédigé par Jules Coatanoan